Un jour, il y a très longtemps, un climat surprenant s’établit dans notre pays. Le soleil se mit à briller de toutes ses forces du petit matin à la nuit noire. Jour après jour, les cieux devenaient de plus en plus torrides, sans le moindre nuage. On aurait dit que les prairies et les champs avaient été incendiés. Les sources et les ruisseaux s’étaient évaporés. Toute la contrée se transforma en une croûte craquelée. Cette fois, les gens, les oiseaux et les autres animaux souffrirent atrocement de la soif.
Cependant, dans la forêt, un grand ours vieillissait tranquillement. Cette canicule le faisait beaucoup transpirer et il pestait sans cesse contre l’épaisse fourrure dont il était affublé. Un jour, il convoqua tous les animaux dans une clairière. Quand la clairière fut pleine, il agita la patte pour obtenir le silence et déclara à tous de sa voix profonde :
«Je suis pourtant déjà bien vieux, mais je n’ai jamais connu ici une telle chaleur ni une telle sécheresse. Nous devons économiser notre eau si nous ne voulons pas bientôt périr de soif. Ecoutez-moi bien, voici ce que nous allons faire : Dans le proche ravin, nous allons creuser un fossé, peut-être atteindrons-nous une source, alors, nous attendrons patiemment que tombe une averse. Je la sens venir. L’eau de pluie emplira notre fossé et nous aurons une provision pour le cas où la sécheresse persisterait. »
Les oiseaux et les autres animaux accueillirent les sages paroles de l’ours avec des cris de joie et se mirent aussitôt à la tâche. Ils creusèrent un fossé dans le ravin en travaillant chacun selon ses moyens.
La taupe s’enfonça dans les profondeurs de la terre et ne tarda pas, comme l’avait prédit l’ours, à atteindre une couche de glaise humide, qui se transforma bientôt en boue et enfin en source claire.
D’un commun accord, le renard et le loup ratissèrent la glaise avec leurs pattes tandis que le corbeau et la corneille creusaient en se servant de leur bec puissant comme d’une pioche.
Sur les pentes, les faucons et les éperviers choisirent des pierres qu’ils transportèrent dans leurs serres pour en faire une digue. Le cerf, le chevreuil et la biche la tassèrent bien avec leurs sabots. Le vieil ours dirigea les travaux et les acheva en aplatissant bien le fond de la future réserve avec ses pattes puissantes. Tous les habitants de la forêt travaillèrent avec zèle et prirent plaisir à faire œuvre commune.
Seul, un loriot ne participa pas à l’effort collectif. Il se contenta de voleter autour des travailleurs en les observant du coin de l’œil et en se moquant d’eux :
« Tiky-tiky-ti,
Moi j’attends la pluie,
Le travail m’ennuie,
Il est pour celui
Qui est assez ballot
Pour boire de l’eau
Dans un vilain trou
Tout empli de boue,
Tiky-tiky-ti,
Moi j’attends la pluie ! »
Les oiseaux et les autres animaux ne prêtèrent pas attention à la moquerie. Ils se dirent, dans leur for intérieur : « Attends, rira bien qui rira le dernier ! »
Et en effet, les choses tournèrent plutôt mal pour le loriot. Les travailleurs de la forêt furent récompensés de leurs efforts. A peine avaient-ils achevé, que le ciel se couvrit de nuages noirs et que l’averse se déclencha. En un instant le ravin s’emplit d’eau de pluie. Et, lorsque survint de nouveau la chaleur et la sécheresse, les oiseaux et les autres animaux eurent assez d’eau en réserve pour étancher leur soif.
Seul, le loriot garda le gosier sec. Il eut beau voler au-dessus du petit lac et tenter de s’y poser afin de s’y rafraîchir, les autres animaux l’en chassèrent en criant :
«Du moment que tu n’as pas collaboré avec nous, tu n’as pas non plus le droit de te désaltérer en notre compagnie. »
Et ils avaient raison. Depuis ce jour, on dit que le loriot est toujours assoiffé et qu’il n’arrive à étancher cette soif que lorsqu’il pleut. Alors, il vole de-ci de-là, le bec ouvert, en essayant de capter les gouttes comme il peut. C’est pourquoi, dans la forêt, résonne son incessante chansonnette :
« Tiky-tiky-ti,
Moi, j’attendri la pluie… »
Lorsque les gens entendent ses petites notes émouvantes, ils disent :
« Tiens, il va pleuvoir. Le loriot appelle la pluie.»
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